Pointant des « préoccupations sur la santé mentale » des jeunes, le ministre de l’Éducation a annoncé une série de mesures qui relèvent plus de l’anecdote que d’une prise en charge sérieuse du problème.
Après le président Macron qui évoquait à la mi-mai la santé mentale des jeunes comme un sujet « dont on parle peu », le ministre Pap Ndiaye, au lendemain de la mobilisation des infirmières scolaires, s’empare à son tour du sujet. Parmi ses annonces : formation a minima de deux adultes par établissement au « secourisme en santé mentale » (sont ciblés CPE et « personnels de la vie scolaire »), inscription d’un numéro vert dans les carnets de correspondance, et externalisation par recours au dispositif « Mon parcours psy », 8 séances prises en charge par l’assurance maladie et les mutuelles.
Une jeunesse qui va mal
La jeunesse n’est pas épargnée : certains élèves souffrent des conséquences des mois sans école, de la pression du contrôle continu, de la sélection avec Parcoursup et de la scolarité en lycée totalement désorganisée qui perd les élèves les plus fragiles. S’ajoutent des inquiétudes quant à l’avenir qui leur est proposé et des familles fragilisées par le contexte économique.
Le suicide est la deuxième cause de mortalité des adolescents, après les accidents de la route, et ces statistiques froides sont bien antérieures à la crise sanitaire, souvent mise en avant pour expliquer tout et son contraire. Passages à l’acte suicidaire, troubles du comportement alimentaire, symptômes dépressifs, décompensations psychotiques, questionnements liés à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre, ne sont pas apparus au tournant des années 2020, ni même au tournant des années 2000. La sécurité des élèves est un sujet autrement plus sérieux que ne le sont les dernières annonces ministérielles. D’autant que pointe toujours cette approche managériale laissant à penser que chacun.e peut faire le travail de l’autre au mépris des qualifications professionnelles.
SOS CPE, PsyEN ignorés
Une fois de plus, le ministre méconnaît le métier et les missions des CPE et des Psy-EN qui ne cessent de parler des difficultés de la jeunesse et d’alerter sur la dégradation de sa santé mentale. Le cœur du métier des CPE est le suivi des élèves et donc la détection du mal être, sa prise en charge en lien avec les familles et les équipes (enseignants, Psy-EN, infirmières, médecins, assistantes sociales…) et l’orientation si nécessaire vers des partenaires extérieurs. Les Psy-EN sont les personnels compétents par leur formation et statut sur les questions de développement psychologique et de souffrance psychique. Il est regrettable et dommageable que le ministre ne se rappelle de l’existence des CPE et Psy-EN qu’à l’occasion des crises et tensions dans les établissements. La formation minimaliste proposée est anecdotique, à plus forte raison quand la formation initiale des personnels statutaires et contractuels est en voie de liquidation.
Notons que le dispositif « Mon parcours psy » est décrié par les psy libéraux car les remboursements sont insuffisants et conditionnés à l’adressage d’un médecin. Il n’y a en outre aucun recrutement de psychologues dans le service public ( Hôpital, CMP, etc.).
Le rapport d’information du député R. Réda sur la médecine scolaire et la santé à l’école permet de prendre la mesure de l’ampleur de la pénurie de Psy-EN en constatant une chute importante de leurs effectifs entre 2017 et 2021.
Pour le SNES-FSU, une mesure adaptée reste la mise en place de collectifs de travail, dans le respect des qualifications et des métiers, prenant appui sur des équipes pluri-professionnelles au complet, formées et disposant de temps de concertation.
Lire également l’analyse du rapport parlementaire (rapport Réda publié le 11 mai 2023) sur la santé mentale des élèves par le secteur PsyEN : https://www.snes.edu/article/rapport-de-lassemblee-nationale-sur-la-sante-mentale-des-eleves/